Quand la jeune Frances est apparue dans des productions de la Paramount
ou de la MGM, à la fin des années 1930, on a d'abord apprécié sa
blondeur, ses pommettes hautes, son menton dédaigneux, sa raisonnable
impertinence. On l'a dite tour à tour provocatrice, communiste,
féministe, athée, amoureuse. Puis on l'a déclarée folle et les
dispositions nécessaires ont été prises. Son indocilité affichée
dérangeait Hollywood et la bonne société américaine, qui n'acceptaient
pas qu'elle déborde le cadre auquel on voulait la cantonner. En évoquant
le destin de cette femme dont seul le corps aura été considéré -
sublimé par les chefs op, admiré par les fans, contraint par la justice,
brisé par la médecine -, Mathieu Larnaudie, qui attaque (comme on le
dirait d'un acide) le réel par la fiction pour donner à penser le
contemporain, livre une réflexion politique sur l'image et l'individu.
De la lumière à l'ombre, des écrans de cinéma à la claustration puis à
une forme plus insidieuse d'exposition, Notre désir est sans remède
suggère que la célébrité est peut-être la manière la plus irrémédiable
d'échapper à soi-même, ou de se perdre. |