Comment se construire contre ses parents ? C’est, au fond, le sujet de
ce roman graphique, second volet du travail autobiographique entamé par
Hugues Barthe avec L’Été 79. Nous retrouvons Hugues là où nous l’avions
laissé à la fin du premier volume. Sa mère, anéantie par la violence de
son mari, s’est enfuie de la maison familiale et s’est réfugiée, loin du
village, chez une amie en ville. Hugues, lui, est envoyé chez sa tante
Dominique et son époux à Besançon. Pour le jeune garçon qui n’est jamais
sorti de sa campagne, c’est un émerveillement. Il découvre la ville –
les magasins, les musées, les cafés, les librairies –, une vie de
famille où les rires remplacent les coups – cela existe donc ! – et une
mère de substitution enjouée, rieuse, curieuse, avec elle il peut parler
de tout – à la différence de sa propre mère, mutique et dépressive…
Mais cette parenthèse enchantée ne dure qu’un temps car, à la fin de
l’été, Dominique lui annonce une « bonne » nouvelle qui est en fait une
terrible nouvelle : sa mère est retournée vivre avec son père.
L’adolescent revient donc chez lui et, rapidement, tout recommence :
l’alcool et la violence du père qui, tous les soirs, se déchaîne contre
sa mère. Cela durera dix ans encore, dix années pendant lesquelles
Hugues grandira sans espoir, sans avenir, isolé dans sa campagne, avec
la bande dessinée pour seul refuge. Il sait qu’il doit fuir mais il n’y
arrive pas. Le déclic viendra de l’annonce de la maladie mortelle de sa
mère. La sachant condamnée, Hugues prend un appartement en ville et
décide de vivre de sa passion : la bande dessinée. Mais il lui faudra
encore vingt ans pour réussir à dessiner ce qui s’est passé cette année
79. Aujourd’hui, à 47 ans, après bien des souffrances et des essais
infructueux, Hugues Barthe a réussi à écrire L’Été 79 et L’Automne 79 –
son œuvre la plus importante, sa libération. |